Quelle agriculture quand l’eau se fait plus rare ? Cette question résume la tension qui pèse aujourd’hui sur l’agriculture méditerranéenne. Dans le Vaucluse, la vigne et les vergers dépendent d’une ressource en eau soumise à une double pression : celle du climat, qui accentue les sécheresses et réduit les débits des rivières, et celle des usages, qui augmentent fortement en été.
Conscients de ce défi, les acteurs du territoire s’organisent. Le département du Vaucluse a adopté un Plan d’Action pour la Ressource en Eau (PARE 2024-2028) et les vignerons coopérateurs, réunis au sein de la Fédération des Caves des Vignerons Coopérateurs de Vaucluse (FCVCV), ont lancé avec le soutien financier de l’Agence de l’Eau Rhône Méditerranée Corse un projet innovant : Vin’Eau.
Son objectif : réduire les consommations d’eau dans les caves, valoriser les eaux dites « non conventionnelles » (effluents, eaux de pluie, eaux de lavage) et construire des modèles circulaires reproductibles.
Enjeux de la ressource en eau en Vaucluse
Le Vaucluse est l’un des départements les plus agricoles de Provence : 31 % de sa surface est cultivée, principalement en vigne, arboriculture et maraîchage. Mais ce patrimoine repose sur un équilibre fragile :
- Un système de ressources vulnérable. Les grandes nappes (Rhône, Durance, Comtat Venaissin) constituent les principaux réservoirs, mais d’autres bassins comme le Calavon, l’Ouvèze ou l’Aygues sont en déficit chronique, classés en Zones de Répartition des Eaux (ZRE).
- Un climat en mutation. Les projections annoncent d’ici 2050 une baisse de 10 à 30 % des écoulements et de la recharge des nappes, tandis que les épisodes extrêmes (canicule, pluies intenses) s’intensifient.
- Des prélèvements élevés. En 2021, 79 millions de m³ ont été prélevés dans les nappes et 92 millions de m³ dans les cours d’eau. L’agriculture en concentre 86 %, bien devant l’industrie (13 %) et l’usage domestique (1 %).
Dans ce contexte, l’enjeu n’est pas seulement de sécuriser l’alimentation en eau potable, mais aussi d’adapter les filières agricoles pour maintenir leur activité et réduire leur empreinte hydrique.


Politiques de sécurisation et de sobriété : le PARE
Face à cette situation, le Département de Vaucluse et ses partenaires ont adopté un Plan d’Action pour la Ressource en Eau (PARE) 2024‑2028. Ce plan découle des États généraux de l’eau et se décline en cinq axes complémentaires :
- Connaître. Le fonctionnement des eaux superficielles est bien documenté, mais il manque des connaissances sur la ressource souterraine.
- Sécuriser. L’objectif est de garantir l’accès à l’eau potable pour tous. Les collectivités, l’État et l’Agence de l’eau ont relancé le projet de sécurisation de l’alimentation du plateau de Sault afin qu’aucun territoire ne soit privé d’eau.
- Économiser. Le plan soutient tous les leviers d’économie d’eau, avec un objectif de sobriété collective. Les actions incluent la modernisation des réseaux, l’accompagnement des usagers pour réduire les fuites et les incitations aux pratiques moins consommatrices.
- Protéger. Il s’agit de préserver le grand cycle de l’eau en restaurant les rivières et les zones humides, véritables « éponges » qui permettent de ralentir l’écoulement, de filtrer l’eau et de recharger les nappes.
- Innover. Le PARE veut soutenir les pratiques innovantes qui économisent et partagent la ressource. Cela passe par l’adoption de nouvelles technologies d’irrigation, de gestion intelligente des réseaux et par des projets de réutilisation des eaux usées.
Les acteurs de la filière viticole se mobilisent pour l'eau : le projet Vin’Eau
Une initiative de filière
La Fédération des Caves des Vignerons Coopérateurs de Vaucluse fédère 26 caves et 3 000 vignerons produisant chaque année 1,2 million d’hectolitres de vin.
Dès 2021, elle a engagé une enquête sur les consommations d’eau de ses adhérents. Celle-ci a révélé une grande variabilité des pratiques et l’absence de valorisation des effluents ou des eaux pluviales.
Face à ces constats, le projet Vin’Eau a été conçu pour transformer les caves en pionnières de la sobriété hydrique.
Une méthodologie structurée
Le projet, financé par l’Agence de l’Eau Rhône Méditerranée Corse et porté par la FCVCV, poursuit six objectifs complémentaires qui structurent l’ensemble de la démarche :
Réduire et substituer l’eau : diminuer les volumes prélevés et recourir à des ressources alternatives comme l’eau de pluie ou les eaux traitées.
Valoriser les effluents sur site : transformer les rejets en ressources pour l’irrigation, la fertilisation ou certains usages techniques.
Optimiser les procédés : identifier et activer des leviers d’économie d’eau à chaque étape de la production, qu’il s’agisse du nettoyage, du transfert ou du refroidissement.
Renforcer les coopérations : fédérer les caves coopératives autour d’une stratégie commune et créer des synergies à l’échelle du territoire.
Sensibiliser et former : accompagner vignerons et techniciens dans l’évolution des pratiques grâce à des outils pédagogiques et au partage d’expériences.
Répliquer et capitaliser : documenter les bonnes pratiques, évaluer les résultats et faciliter la diffusion de ce modèle vertueux à d’autres structures viticoles.
Des objectifs clairs
Le projet, d’une durée de 24 mois (mars 2024 – février 2026), se déroule en cinq étapes : un état des lieux détaillé, la construction de scénarios de circularité de l’eau, une étude de faisabilité technico-économique, la mise en œuvre de plans d’action sur 5 sites pilotes, puis la diffusion des bonnes pratiques à l’ensemble de la filière.
L’ambition est double : réduire l’empreinte hydrique immédiate des caves et créer des modèles reproductibles pour d’autres territoires viticoles en France.


Conclusion
Le Vaucluse se trouve à un moment charnière : le changement climatique et l’augmentation de la demande en eau menacent la pérennité de ses vignobles et de ses paysages.
Cependant, cette situation est aussi une opportunité pour innover. En combinant des politiques ambitieuses (PARE), des investissements d’envergure (programme de la SCP), et des initiatives pionnières comme Vin’Eau, le département peut transformer la contrainte en levier de durabilité.
Pour les entreprises, les collectivités et les professionnels du secteur viticole, qui souhaitent en savoir plus sur le projet Vin’Eau, contactez-nous !
- FAQ's
Foire aux questions
Le Vaucluse est un territoire agricole où la vigne et l’arboriculture occupent une place majeure. Or, le climat méditerranéen accentue les sécheresses et diminue les débits des rivières et la recharge des nappes. En 2021, 92 millions de m³ d’eau de surface ont été prélevés, dont près de 86 % pour l’agriculture. Cette dépendance rend la filière vin vulnérable aux pénuries.
Vin’Eau est un projet porté par la Fédération des Caves des Vignerons Coopérateurs de Vaucluse (FCVCV) et financé par l’Agence de l’Eau Rhône Méditerranée Corse. Il vise à réduire les consommations d’eau dans 28 caves coopératives du département, en optimisant les procédés de production, en valorisant les eaux pluviales et les effluents, et en diffusant de bonnes pratiques à l’ensemble de la filière viticole.
Le projet s’articule autour de six axes : réduire et substituer l’eau prélevée, valoriser les effluents sur site, optimiser les procédés de vinification, renforcer la coopération entre caves, sensibiliser et former les acteurs, puis capitaliser et répliquer ces bonnes pratiques à d’autres territoires.
Les caves, collectivités et entreprises peuvent rejoindre la dynamique en adoptant des équipements économes, en explorant la réutilisation de leurs propres ressources (eaux de pluie, effluents), et en participant aux concertations pilotées par la FCVCV. L’objectif est de mutualiser les efforts et d’amplifier l’impact du projet, au service de la durabilité de toute la filière viticole vauclusienne.